Le nouveau roman abandonne notamment l'idée de récit. Ses partisans considèrent la littérature comme un jeu formel, une sorte de mathématique avec des mots pour certains, ou d'alchimie pour les autres. Ils estiment que chercher à décrire un environnement réel, à explorer la psychologie de personnages donnés, ou se contenter de suivre le fil d'une histoire linéraire nous empeche de voir toutes les potentialités du genre romanesque.
Comme tu le vois c'est en complète opposition avec la démarche balzacienne qui vise à reconstituer la réalité, la vie sociale en particulier. Subordonner ainsi le roman au réel, à une vision étroite du réel, est un erreur pour les ecrivains que l'on classe dans le nouveau roman. Ces derniers ne forment toutefois pas un groupe homogène et leurs idées, leurs démarches, diffèrent énormément de l'un à l'autre.
L'oeuvre type du nouveau roman est peut-être La Modification de Butor : c'est simplement la description seconde après seconde de ce qui se passe dans la tête d'un voyageur dans un train entre Paris et l'Italie. Le roman est écrit à la deuxième personne, ce qui est troublant. Tout au long du voyage le personnage lit un livre qui s'avère être finalement... La Modification. Pour écrire son livre, Butoir avait travaillé sur des dizaines de diagrammes accrochés aux murs de sa pièce de travail.
Tu vois que c'est une démarche d'écriture très spécifique. Toutefois il ne faut pas exagérer les ruptures mises en scène par ces auteurs : même s'ils élaborent une problématique de la création littéraire originale, ils s'inscrivent dans une tradition du roman qui a une forte continuité.