« -Bon, on dirait qu’on est bloqué, dis-je benoîtement ! »
« -J’espère que cela ne va pas être long, fait d’une voix très féminine l’aguicheuse »
Après avoir adressé un sourire à cette dernière, mon regard quitte ses atours pour se poser sur le panneau de l'ascenseur : de nombreux boutons noirs, avec des chiffres allant de -1 à 10, un bouton blanc, et un bouton rouge avec une petite "cloche. Je vais pour appuyer dessus pour appeler les secours, mais la grosse main du blaireau me précéde. Une sonnerie retentit, alors qu'un clignotement apparaît. on se regarde en grimaçant. Ce bruit n'est pas très agréable. Le musicien se plaint en nous disant qu'il s'agit d'une fausse cloche.
A ce moment là, le bruit s'arrête, le clignotement cesse, le bouton reste toute fois allumé.
Mais, l'ascenseur ne redémarre pas.
Les "Ah !" de soulagement laissent place à la perplexité.
L'intellectuel demande ce qu'il se passe, en s'adressant plus spécifiquement au musicien, mais avisant sa tenue : chapeau noir, smoking noir, noeud papillon noir au-dessus de chemise blanche, et sa boîte (qui a la forme d'un violon), il s'arrête. C'est l'aguicheuse qui va jusqu'au bout du raisonnement : "vous travaillez pour une compagnie d'acsenceurs pour savoir cela sur l'alarme, monsieur", dit-elle au musicien.
"Du tout, dit-t-il avec un sourire avenant ! Je suis musicien. Mon instrument de prédilection n'est pas la cloche d'alarme d'ascenseur, mais j'ai une certaine expérience des sons comme vous pouvez l'imaginer !"
S'ensuit une conversation où le musicien célébre, violoniste, parle de sa vie. Les autres lui posent des questions et l'écoutent. L'intellectuel le connaît : il était déjà allé à un concert à l'Opéra de Lyon auquel le violoniste avait pris part. L'artiste parle d'autres concerts qu'elle a vu. Les interventions de l'aguicheuse se limite à quelques pouffements de rire. Pour ma part, j'écoute.
L’intellectuel critique la façon dont la télévision manque d’exigence en matière d’art.
"- Si c'est pour se faire chier devant des spectacles de danse à la con avec des hommes en collant blancs comme sur Arte intervient le blaireau, qui rongeait son frein depuis un moment…"
L'artiste le fusille du regard : "-comment vous pouvez dire ça ? Il y a tout un travail sur l'expression de l'émotion, dit-t-elle, il faut savoir se faire emporter"
"-Emotion, mon cul ! , réplique le blaireau ! C'est comme les films psychologiques français. C'est gnangnan, débile...
"Et y a toujours du cul, continue-t-il en jetant un regard libidineux à l’’aguicheuse."
"-Et, quels sont les spectacles qui vous plaisent ?, demande sur un ton condescendant l'intello au blaireau"
"-Bah, des films qui bougent, comme Taxi, etc...Les courses de formule 1 aussi, et le sport à la télé. Quoi ! L'esprit de compétition, etc..."
Si l'aguicheuse croit bon de rajouter que l'autre coup en boîte, elle a rencontré Djibril Cissé qui mixait, les autres roulent de grands yeux. L'intellectuel dit simplement "c'est votre choix" et il reprend la conversation avec l'artiste et le musicien célébre en ignorant le blaireau. L'intellectuel se dit même sceptique sur l'exigence des spectateurs des semaines de la musique classique à Nantes, ce en quoi l'artiste n'est pas d'accord. Elle dit qu'il faut faire venir les gens vers l'art, et que ces festivals sont aussi une bonne opportunité de travail pour tous ceux qui sont intermittents du spectacle.
Le blaireau fait un petit commentaire déplaisant, mais ils n'en ont cure : ils parlent d’expositions qu’ils ont vu tous les trois. L'aguicheuse essaie de capter le regard du musicien célèbre.
Le blaireau commence à faire les cent pas.
Tandis que l'artiste et l'intellectuel parlent d'un ami commun, sculpteur de la provocation, l'aguicheuse s'approche du musicien , et demande à voir son violon ingénue. Le violoniste s'éxécute. J'en profite pour regarder aussi le bel instrument de musique.
"On pourrait peut-être s'en servir pour essayer de sortir de là, fait l'aguicheuse, tout en carressant l'instrument et en même temps, fausse innocente, la main du musicien renommé.
"Ah oui, on va forcer la porte avec la baguette là, fait le blaireau"
"L'archet, je corrige avec une voix faible"
Le musicien roule des yeux outrés.
L'aguicheuse décide alors de prendre son parti :
"-Non, je voulais dire qu'il pourrait jouer un air, ça attirerait peut-être les secours."
"-Et moi, cela me ferait beaucoup de plaisir de vous entendre, rajoute-t-elle en minaudant"
Nous sommes tous d'accord.
"-Bon, mes amis d'infortune, allons-y donc pour une sonate, accepte le musicien"
et, la jolie musique retentit. Pas une fausse note, mais une jolie mélodie. L'aguicheuse danse avec tous ses compagnons d'infortune, ce qui déride un peu le blaireau, ce qui décrispe un peu l'intellectuel, et me plaît bien. Elle est dynamique et habillée sexy. L'artiste se mêle au bal.
Le musicien sourit à ses danseurs.
L'arstite en prenant l'aguicheuse par la taille, change le sens de la danse. Le blaireau récupère ensuite l'aguicheuse et se colle à elle. Comme elle se laisse relativement faire, il lui adresse un sourire carnassier. dans notr etour, l'artiste et moi, on se demande si les secours sont déjà en train de réparer l'ordinateur. J'adresse un regard au panneau de l'ascenseur. Ca n'a pas changé. Le bouton d'alarme est toujours rouge lumineux.
L'aguicheuse veut changer de partenaire, mais el blaireau la tient assez fort. Elle réussit quand même à s'aggriper à l'intellectuel qui était planté au milieu de l'ascenseur, et qui le prend donc en charge à son tour. Elle lui demande ce qu'il fait dans la vie. Tandis que le blaireau d'adosseà la paroi de l'ascenseur et enlève un bouton de sa chemise.
L'artiste préfère rester avec moi qu'aller vers lui. On discute un peu de la décoration minimaliste de l'ascenseur. Deux lampes au plafonnier. Un des globes est éteint. Mais, en regardant d'un peu plus près et en évitant la lumière de l'autre, j'y vois quelque chose. L'artiste aussi.
Je suis grand, je m'approche pour voir que c'est, tandis que le blaireau essaie de reprendre en main l'aguicheuse en posant sa main sur son épaule...
Je n'avais pas rêvé : c'est bien une caméra qu'il y a dans ce globe électrique éteint.
Et, elle tourne...